Il y a 3 façons de transformer un dîner ennuyeux en soirée enflammée. À condition d’aimer le danger.
Annoncer que vous avez :
1. Vu le dernier Polanski
2. Voté Zemmour
3. Pris des places pour le concert d’Aya Nakamura.
Etonnamment, sur les 2 premiers, un débat peut se lancer. II y en aura toujours un pour soutenir qu’il faut séparer l’homme de l’artiste ou que l’extrême droite, on n’a jamais essayé.
Alors que Aya fait l’unanimité. Contre elle.
Rhooo lala, mais Naya Nakamachin là, je peux pas. Ses paroles, oh secoooours.
On dirait que prononcer son nom correctement lui témoignerait déjà trop de respect. Pour citer Marion Maréchal Le Pen ou Xavier Dupont de Ligonnès, personne ne bégaye, pourtant.
J’ai pris mes places pour le concert d’Aya. Si. Et vous venez de me juger. Sentez-vous à l’aise, tout le monde le fait. Mais on va devoir se fighter maintenant.
Parce que j’ai une théorie. Les détracteurs d’Aya sont des quiches en anglais. Ne le prenez pas personnellement, c’est le cas de la moitié de la population française. Je ne sais pas ce qui s’est passé, mais à “Where is Brian ? Brian is in the kitchen.”, on est beaucoup trop à avoir estimé qu’on pouvait s’en tenir là.
Il est à la cuisine Brian ?
La cuisine en France on maîtrise.
Pas besoin de leçons supplémentaires. Bye.
Parce que si ces défenseurs de la langue de Molière étaient cohérents, ils seraient logiquement tout aussi regardants sur les titres écrits dans la langue de Shakespeare.
Prenons Diamond, de Rihanna.
Shine bright like a diamond, Shine bright like a diamond. Find light in the beautiful sea, I choose to be happy. You and I, you and I, we're like diamonds in the sky.
You're a shooting star…
Soit littéralement…
Briller brillamment comme un diamant, briller brillamment comme un diamant. Trouver la lumière dans la mer belle, je choisis d’être heureuse. Toi et moi, nous sommes comme des diamants dans le ciel. Tu es une étoile filante…
Il suffit d’ajouter le mot “maman” par ci par là et nous voilà avec un poème de fête des mères niveau CP.
Maman tu brilles comme un diamant, tu es aussi belle que la lumière dans la mer, tu es comme un diamant dans le ciel, tu es une étoile filante.
Peut-être une mère décédée à bien y réfléchir. Mais sur le principe ça fonctionne. Pourtant, personne ne rit de Riri. Vous dansez et chantez en yaourt et ça suffit à votre bonheur. Vous pourriez faire pareil avec Aya. Rihanna elle-même s’ambiance sur Djada.
C’est bizarre cette idée de se réclamer de la langue Molière, d’ailleurs. Comme si les français héritaient automatiquement de sa plume. On compte plus de drama queens que de dramaturges, non ?
Quand Aya a été annoncée en tête d’affiche sur la page Facebook du Mainsquare Festival, des centaines d'internautes se sont déchaînés dans la section commentaires.
On se moque souvent de Facebook, qui serait le réseau social qui a toujours 6 mois de retard sur l’actu ou les vannes. Les plus outrés ne s’étaient à priori pas connectés depuis 2004, vu qu’ils réclamaient Lenny Kravitz et Radiohead en lieu et place d’Aya.
Le Mainsquare, c’est à Arras dans les Hauts de France. Je trouve qu'en tant que peuple bilingue franco-biloute, on devrait être exemplaires dans notre tolérance des libertés prises avec le français.
Parce que si Aya était d’ichi, “Jolie nana” devenait potentiellement…
Bielle chtiote va querre bieau garchon
Commin qu’on fait, chuis pas très carabistoules.
Et tous les chtis auraient parfaitement compris les paroles. Qui ne sont pas plus de Molière que les vraies.
Le saviez-vous ? On pense tous avoir lu Molière à l’école. Le Bourgeois Gentilhomme & co. Et bien figurez-vous que c’était une version traduite. On ne saurait pas lire du Molière dans le texte.
En plus à son époque Molière, n’était pas une référence pour tout le monde. On lui reprochait d’inventer des mots et d’être vulgaire. Ça ne vous rappelle pas quelqu’un ?
Il se faisait clasher par les critiques littéraires et les philosophes.
“Il n’a manqué à Molière que d’éviter le jargon et d’écrire purement.”
La Bruyère
“Il avait une facilité incroyable à faire des vers, mais il se donnait trop de liberté d’inventer
de nouveaux termes et de nouvelles expressions :
il lui échappait même fort souvent des barbarismes.”
Bayle
Dans quelques siècle, si ça se trouve. On critiquera les nouveaux auteurs en disant…
Oui mais quand même, la France, le pays de la langue d’Aya Nakamura !